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Divagations

Revue N° 33 Page 05

Le curé de Saint-Paul...

- "Dis-moi chérie, je n'ose te le demander, mais ne crois-tu pas qu'avec les indemnités versées par les Allocations Familiales pour la naissance de notre premier enfant, je pourrais m'acheter un vélo ?'
- Ces allocations, ont en a bien besoin mais si ça te fait plaisir !"

Quinze jours après, avec mon ami Marcel, je teste cette nouvelle bicyclette bleue. Il fait chaud. Nous n'avons, ni l'un ni l'autre, pédalé depuis de nombreuses années. Vers le lac d'Aiguebelette, nous ''coinçons'' vraiment ! Marcel me dit qu'il connaît le curé du village que nous traversons et que peut-être il nous donnera la boisson miraculeuse qui nous fait tant défaut. Le curé est là, il nous installe dans son bureau. Il pousse son fauteuil et disparaît sous la trappe de sa cave. C'est avec un grand "Marestel", offert par ses paroissiens, qu'il essaie d'étancher notre soif. Nous buvons la bouteille de ''blanc'' d'un trait. Monsieur le curé replonge sous son bureau et nous buvons la seconde bouteille avec autant d'empressement. Dans la montée du col du Chat, nous zigzaguons au sens propre comme au figuré, une voiture nous rattrape et s'arrête :

- "Dites-moi les petits, l'homme au marteau est passé ?"

nous dit le chauffeur d'un air goguenard. Il a un vélo de course sur le toit de son auto et il nous propose de nous hisser jusqu'au col. Nous refusons énergiquement et atteignons le sommet bien difficilement. Notre homme est là, toujours aussi narquois, il nous dit qu'il attend un cycliste qui effectue quelques kilomètres pour se désintoxiner. Effectivement, quelques minutes plus tard, un véritable "obus", couvert de sueur, arrive à une vitesse impressionnante. Le vélo du "coursier" est vite hissé sur le toit de la voiture. Les deux compères repartent en nous souhaitant de bien terminer notre périple. Visiblement, ils ont compris notre état et ils en rient ! Deux jours après, notre ''obus'' gagnait brillamment le trophée Baracchi en Italie. C'était Jacques Anquetil. Notre champion et surtout son manager, Raphaël Geminiani, s'étaient bien moqués de nous au "Chat".

Au Ventoux…

Il pleut fort, il fait froid, le jour tarde à se lever en ce samedi de septembre du début des années 70. Les cyclos sont gelés, ils se blottissent les uns près des autres à l'abri, sous les arcades de l'Hôtel de Ville, place des Terreaux. Le départ du célèbre Lyon-Mont-Ventoux est donné. Pédalons-nous sur la R.N.86 ou sur le Rhône ? Personne ne sait ! Personne ne parle ! Un concurrent s'arrête pour satisfaire un petit besoin naturel. Il nous dira plus tard qu'il avait si froid et qu'il était si mouillé qu'il eut d'énormes difficultés à trouver son "instrument".

A Malaucène, il ne pleut plus, la course est lancée pour de bon. La grimpée du Ventoux est difficile, il n'y a pas d'air dans le "Géant" de Provence. Tous les concurrents souffrent, souffrent... Je déteste la forte pente mais j'ai toujours refusé de mettre pied à terre. A quelques kilomètres du Mont-Serein , je n'en peux plus. Je monte à pied, Michel, mon camarade de club me rattrape, lui aussi est mal en point. Nous marchons de concert, près de nos montures. Je lui propose de lui offrir une bière au chalet du Mont Serein. Cette bière nous ne cessons de la savourer d'avance…
Mais voilà, je me retourne et aperçois la seule femme de l'épreuve : une Marseillaise qui pédale pas mal du tout. Elle va nous doubler ! Pas question de me faire dépasser par une "femme". Sans rien dire à mon compagnon d'infortune, je remonte sur mon vélo et refuse obstinément de me faire rattraper. Le sommet est atteint, au prix d'énormes efforts, mais devant la Marseillaise ! Plus de trente ans après, Michel, que je rencontre régulièrement au marché, me réclame toujours sa bière ! Et depuis, combien de fois me suis-je fait doubler par des pédaleuses ? Croyez-moi, chers amis, la morale est sauve.

Grave erreur…

L'allure est vive, les six cyclos sont en forme et en pleine possession de leurs moyens d'hommes de trente ans. Appliqués, se relayant parfaitement, deux par deux, ils "glissent" dans la vallée de la Guisane. Une voiture les rattrape, puis les suit un long moment. Elle klaxonne une fois, puis encore et encore… Jean-Pierre, professeur dans un lycée connu, si gentil et apprécié d'ordinaire commence à s'énerver. Il bougonne…

En klaxonnant encore, la voiture décide de doubler le groupe. Jean-Pierre n'en peut plus, quand la voiture arrive à sa hauteur, il crache très fort sur le pare-brise. Grave erreur ! trois cents mètres plus loin, l'auto est immobilisée, trois gendarmes en sortent et nous arrêtent. Ils nous confisquent nos cartes d'identité et nous demandent de les suivre, en cortège, derrière leur estafette, jusqu'à la gendarmerie de Briançon. Comme nous avions déjà parcouru près de 180 kilomètres, le Télégraphe et le Galibier, nous avions besoin de souffler et de nous restaurer. Sur le trottoir, devant la gendarmerie, nous déballons nos ravitos.

Après une heure trente d'attente, pas de nouvelles de nos cartes d'identité. Je suis chargé de me rendre auprès des gendarmes pour négocier. La maréchaussée est intransigeante, elle refuse de nous rendre nos cartes. Alors, je leur demande d'appeler notre camarade de club, Maurice, commissaire de police, lui devrait témoigner de notre bonne solvabilité. Maurice, nous connaissant bien, a vite compris et a profité de la situation pour en rajouter… Nous finissons par l'Izoard, Vars, dans la montée du Sauze de Barcelonnette, la nuit est profonde. Compte tenu de nos deux bonnes heures de retard, l'hôtelier refuse de nous servir les pâtes prévues. Merci encore Jean-Pierre… !

Tableau d'horreur…

- "Allô, mon cher Général-Secrétaire, excuse-moi de te déranger de bon matin mais je suis obligé de te rappeler que c'est le dernier jour pour transmettre à l'imprimeur les textes pour la prochaine revue des "Cent Cols"…
- As-tu les derniers renseignements pour clore le tableau d'honneur ?"…
- Oui, bien sûr, Président, je te donne les dernières modifs mais, attends, j'ouvre mes volets…" … Catastrophe ! il y a un cheval dans ma piscine..."

Le téléphone tombe…, la communication est coupée… Quelques heures plus tard, je sus qu'un cheval s'était échappé de son enclos et avait confondu la superbe bâche verte de la piscine de mon bon ami avec un nouveau champ fraîchement tondu. Même s'il fallut plusieurs heures pour sortir le canasson de son bain et quelques minutes pour que votre Général-Secrétaire retrouve ses esprits, la revue fut livrée aux membres de la Confrérie en temps et heures prévus.

Jean Perdoux

CC n°1


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