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Deux belges au sommet de la Bocca di a Guardia

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Jules César l’a dit il y a bien longtemps : «De tous les peuples de la Gaule, les Belges sont les plus braves» et il a ajouté, même si cela n’est pas repris dans toutes les versions du De Bello Gallico, «mais ils sont les seuls à ne pas savoir ce qu’est un col !».

Aussi, pour enrichir nos connaissances, nous avions décidé, ma femme et moi, de faire quelques exercices de révision (ou de rééducation) sur les routes corses en ce beau mois de mai 2002. Joli mois de mai ? L’accueil de l’île de beauté fut plutôt froid et humide et c’est sous un ciel gris et pluvieux qu’il fallut commencer notre périple. Fort heureusement, tout s’arrangea par la suite et le soleil illumina nos derniers tours de pédale comme pour nous inviter à revenir plus tard.

Les exercices de révision furent nombreux et variés depuis le col de Teghime jusqu’à la Bocca Fogata en passant par plus d’une centaine d’autres, tous aussi pittoresques et attachants.

Il y eut bien sûr les classiques, le Vergio, le plus haut mais aussi un des plus faciles au départ d’Evisa, le Sorba, long et sauvage, tous les cols de la Castagniccia où courent les cochons en liberté. Il y eut le terrible Bavella, grimpé depuis Solenzara et son marchepied, le col de Larone pendant lequel je crus avoir le plaisir de grimper mon 1000ème col. Depuis mon retour, j’ai eu le temps de refaire les comptes et il apparaît que c’est le modeste Foce (48 m) qui aurait l’honneur suprême !

Il y eut des exercices difficiles où il fallait mettre à contribution toute sa science de la grimpette. Il y eut les exercices pour débutants, franchis sur le grand plateau.

Il y eut surtout la terrible Bocca di a Guardia…
Nous venions de franchir le col di Paretu en guise de répétition. Quittant l’anse de Cardo où un sympathique tenancier de paillote à qui nous avions commandé deux cafés s’était indigné parce que nous osions remplir nos gourdes au lavabo des toilettes sans sa permission, nous savions que nous devions franchir le fabuleux col de Guardia et ses 19 mètres d’altitude avant de plonger sur Favone.

Nous étions le 13 mai 2002, il était 14h13 et nous attaquions la face sud du géant de Corse. Enfin, quand je dis que nous attaquions, c’est un euphémisme : tout à coup, après trois tours de pédales, nous nous retrouvâmes à l’entrée de Favone. Nous venions donc de franchir l’obstacle sans nous en rendre compte (par son versant le plus facile, je le concède !).

L’émotion nous prit alors à la gorge ! Allons, petit Belge, découvre-toi, savoure l’instant qui passe : tu viens de franchir un col authentique, au relief bien marqué, malgré ses dix-neuf mètres. Un col géographique, mais aussi un vrai col historique, attesté depuis la plus haute antiquité.

Ne raconte-t-on pas qu’Hannibal est passé ici lorsqu’il allait mettre une raclée à Rome et aux Romains ? Il voulait éprouver la résistance de ses éléphants avant de leur faire franchir les cols enneigés des Alpes. Deux d’entre eux périrent dans l’aventure et en cherchant bien, on trouve encore quelques débris d’ossements sur le piton ouest du col !

Après une telle aventure, il ne fait aucun doute que nous n’aurons plus jamais l’audace de proposer à la noble confrérie de faire figurer en si bonne compagnie ces malheureux cols belges où ni Hannibal, ni Attila, ni Gengis Khan ne sont jamais passés !

Bernadette Cornet CC 4780 et Fernand Yasse CC 3680


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