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Les monts de la Mer Noire

Revue N° 31 Page 13

Il existe dans la moitié Est de la Turquie le long de la mer Noire, un massif montagneux du nom de « Dogu Karadeniz Daglari », en français les Monts de la mer Noire. Ce massif, long de près de 300 km, est une chaîne de montagne, parallèle à la côte de la mer Noire qui commence à la vallée du Harsit près de Giresun et se termine aux confins de la Géorgie à Batum. Son « épaisseur » moyenne est de 70 km. Au Nord, la mer Noire et au sud les hauts plateaux anatolien qui se tiennent à 1800 – 2000 m d’altitude. Cette chaîne culmine à 3937 m au Kaçkar.

Bien entendu, cette chaîne est « percée » de voies de communication sans doute très anciennes qui permettent la circulation entre les hauts plateaux et le bord de mer. Nous voilà donc au fait, chaque voie passe par un col de haute altitude. J’ai eu l’occasion voilà maintenant bien longtemps de parcourir en tous sens ce massif et de découvrir ses routes et ses pistes, c’était en 1983.

Pour en finir avec la description de ce massif, il faut savoir que le versant Nord, côté mer Noire, est une région pluvieuse, verte, et cultivée qui ressemble étrangement à notre Savoie, et que le versant sud est à l’inverse aride et sans forêt à l’instar du Maghreb par exemple. Il est fréquent que la mer de nuage se bloque sur la ligne de crête avec de la pluie sur un versant et une chaleur torride sur l’autre versant.

Après cette mise en condition, je vais vous faire envie avec la description de tous ces cols magnifiques, ils ont sans doute un peu changé depuis mais si cela peu vous donner des idées de voyage…

Le col de Zigana 2025 m. C’est le premier des passages en commençant par l’ouest. C’est aussi le principal passage. Il relie Trabzon, ville de la côte et à Erzurum. C’est le seul qui soit goudronné et il y avait à l’époque un tunnel en construction. Le trafic y est intense. Le plus intéressant de ce col n’est pas son franchissement par la route, mais les deux hautes routes qui en partent et qui serpentent sur les crêtes de chaque côté. A l’Ouest 5 cols à plus de 2000 m voire plus car les pistes foisonnent dans tous les sens, cette montagne étant très habitée l’été par des bergers qui viennent en alpage. Des pistes ont été tracées dans tous les sens pour alimenter chacun de ces hameaux d’altitude. Côté est du Zigana part une magnifique route de crête qui passe par sept cols à plus de 2000 m. En bout après le hameau de Camibogazi une piste permet de redescendre sur le monastère arménien de Sumela, accroché dans une falaise.

Le col de Hostandagi 2280 m. Ce col n’est, selon les cartes, accessible que par le versant sud. C’est le seul col où je ne sois pas monté.
Le col de Kostan 2280 m. Comme tous les cols de ce massif, son ascension depuis la mer à Arakli commence par une longue remontée d’une vallée. C’est le pays de la noisette, et jusque vers 500 m d’altitude, les flancs de montagne son couvert de noisetiers. Si vous venez en septembre, vous y verrez la récolte. Puis la route s’élève ensuite plus rapidement avec quelques rares lacets, puisqu’elle garde le fond de vallée jusqu’au col. C’est après un paysage de sapins qui finissent par s’étioler quand on débouche dans les alpages. Puis après le col un plateau d’altitude permet par des pistes sommaires de rejoindre deux autres cols à plus de 2300 m. De là, redescente sur Bayburt.

Le Col de Soganli 2330 m. Depuis Of sur la côte c’est une très longue remontée vers les sommets, près de 80 km. Le début est gentillet et agréable dans les cultures abondantes. Puis commence les choses plus sérieuses, la route se met à flanc de coteau. Plus haut encore elle devient impressionnante, lacet, "relacet" sur cette piste étroite dans une pente vertigineuse. Enfin c’est le col, un alpage tranquille. La descente, du moins à son début, est également magnifique. La piste traverse deux villages d’alpage avant d’aboutir dans la plaine de Bayburt.

Le col d’Ovitdagi 2600 m. C’est le plus haut et le plus beau de tous. Le départ en bord de mer vers Rize se fait dans les théiers. C’est verdoyant. Plus loin donc plus haut les flancs de montagne toujours très habités sont couverts de terrasses où poussent notamment du maïs. Il y a des maisons partout jusque très haut. Pas d’accès en voiture possible pour celles-ci, il faut monter à pied. Ce sont des maisons à soubassement de pierre et en bois pour les étages. Quand arrive la forêt vers 1500 m, on pourrait se croire quelque part dans le Beaufortain ou dans le Chablais. Un détail tout de même, il est surprenant au débouché d’un village de voir que notre clocher a été remplacé par un minaret effilé. A 2000 m commencent les alpages qui finissent par laisser leur place aux rochers et aux paysages d’altitude. A l’époque la redescente côté sud était particulièrement pénible, la piste était grossière et pendant 40 km il fallait se faire secouer sur les galets.

Le col de Cankurtaran 690 m. C’est le col qui ferme la chaîne côté Géorgie. En fait, il coupe un méandre du Coruh.

Et pour finir, car il serait impensable de visiter cette région sans s’y rendre, le lac sur le Tortum, affluent du Coruh. Ce lac de barrage a nécessité la reconstruction de la route dans les parois du versant. Extraordinaire route qui domine le lac dans des lacets des plus aériens au-dessus de l’eau.

Christophe Guitton

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