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Un petit vélo dans la tête.

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Que la montagne est belle ! Mais que d'efforts doivent être consentis pour atteindre au fil de ses cols le nirvana du cyclo.

Je me souviens de certaines ascensions où me démenant comme un beau diable sur mon arachnéenne compagne, je cherchais au fond de moi-même les ressources nécessaires qui me permettraient de monter encore plus haut.

L'oeil hagard fixé sur la ligne bleue du col, je luttais contre une accablante pesanteur pour arracher mes boyaux collés au bitume.

Combien de fois la délectable idée d'abréger mes souffrances et de jeter mon vélo dans le ravin me traversa-t-elle alors l'esprit ! Il fallait être véritablement accro pour ne pas céder à une aussi séduisante invitation.

Pourtant, une motivation plus forte encore m'empêchait de mettre pied à terre et me poussait à donner un nouveau coup de pédale qui me rapprochait de mon interminable quête. Et quelquefois, le coup de grâce m'était donné lorsque planté au milieu de la route, je voyais avec envie un cycliste aux jarrets d'acier me déposer sur place en un rien de temps. Je pensais alors qu'était peut être venu le moment de me "recycler", mais cependant je continuais, car une nouvelle fois la passion l'emportait sur la raison. Et quelques kilomètres plus loin, je me surprenais même à siffloter... I am a poor lonesome cyclo...

Mes sombres pensées s'étant évanouies en franchissant le col, j'avais à nouveau pour ma bicyclette les yeux de Chimène tandis qu'une agréable sensation de liberté retrouvée m'envahissait tout entier.
Comme vous pouvez le constater, j'étais tout a fait prêt pour l'inoculation dans les mollets du virus bien connu des chasseurs de cols qui s'insinue progressivement dans vos fibres musculaires et gagne rapidement votre cerveau.

Moi qui avais déjà un petit vélo dans la tête, je vous laisse imaginer les ravages du virus ! Certes les premiers symptômes s'étaient manifestés par des montées de cols épisodiques. Habitant Grenoble, j'avais grappillé de ci de là les cols routiers du Vercors, de Chartreuse et de l'Oisans, mais avec l'acquisition d'un VTT, tout un univers de cols muletiers s'ouvrait désormais devant moi.

Nouveau venu dans la Confrérie (j'ai soufflé ma première bougie cette année), je me mis alors à étudier les cartes IGN et à quadriller systématiquement la région grenobloise découvrant ainsi de nouveaux horizons: du romantique Pas du Berlioz à la piquante Porte Coche, du col de la Charette (sans les boeufs) au vertigineux Pas de la Cheminée, de la Croix des Cochettes jusqu'au fin Fond des Sciaux et bien d'autres cols méconnus qui ne dévoilent leurs charmes qu'après de bonnes suées.

Après l'évocation fugitive de cette saison de chasse bien remplie, je ne formule qu'un seul souhait:

que les futures moissons de cols soient aussi riches dans leur diversité.

Maurice OCCELLI N°3975

GRENOBLE (Isère)


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