Page 33 Sommaire de la revue N° 17 Page 35

Coliculture

Revue N° 17 Page 34

Des cols, des cols.

Grâce à Dieu et à nos parents, nous pouvons escalader et escalader encore ; voire descendre et descendre encore. Tout dépend où se situe le plaisir. Je n'ai pas encore trouvé de col Dieu ou de col Vélo. Alors je me suis adressé à ses saints et saintes : Saint Léon (57), Sainte Lucie (06), Saint Sébastian (06), Saint Jean (06), San Bernardino (Suisse).

Je n'en ai vu aucun en chair et en ailes. Pas plus que je n'ai vu la Vierge dans les Vosges (deux fois), où pourtant elle doit veiller sur les cyclos montant ou descendant le plus élevé des deux cols à elle dédiés. Elle n'était pas non plus aux cols Notre-Dame (09 et 63) qui comme tous les autres m'ont vu passer. Pas plus de vierge que de clarisse (vierge ou pas), au col de la vierge clarisse (54).

Ne voyant pas les êtres célestes, je suis revenu sur terre pour manquer de peu le Pape (06) et l'évêque (83). Et si je n'ai pas trouvé de col Etranger pour m'accueillir, le col des Français (57) nous a vu rouler en compagnie d'une étrangère. L'exode rural ayant fait son œuvre, je n'ai vu personne au col des Sept Frères (22). Quant au Lithier (70), à la Charbonnière (67), aux Charbonniers (88), ils devaient être sur le chemin du Cendrier (01) pour y déposer quelques cendres du Four (09) où il ne faisait pas si noir que le dit le proverbe lorsque j'y suis passé.

Quant à Marie-Louise, elle avait déserté son Sapin (54), et Agnès (09) s'était absentée, à moins qu'elle ne fût une des vaches ou pouliches paissant par-là. Et aussi Paule (06) que je n'ai pas vu. Et si Mathieu était absent de son Pas (83), au pied de celui-ci, nous avons longuement bavardé avec Georges, un des habitants des lieux.

Et s'il y a des bonhommes au Bonhomme (88), et ce en toute saison, fussent-ils de neige ou de chair, et s'il y a un minet au col du Minet (54), c'est que je peux être considéré comme tel à l'état brut, et à fortiori sur une bicyclette. Mais la chose reste à prouver. De même, mes fans étaient absents de leur col (07) lors de mon passage, et j'en suis fort triste. Et si je n'ai pas vu de sportif ou de poisson au col de la Perche (66), j'ai vu des sangliers à la Baisse des Charretiers (83), mais pas l'inverse (83) ; tout comme je ne verrai pas de Jeanne au col de la Jeanne (19) tant que je n'y aurai pas emmené belle-maman.

Et si j'ai vu des Cerbères (66), ils n'ont pas été méchants ces douaniers, puisque deux fois ils m'ont laissé passer sans m'arrêter. Si le Père Cornère (66) était parti se promener, les militaires du corps de Garde (83) qui n'ont pourtant rien fait sauter au col del Boum (11), aussi. Quant au Comte (83), je n'ai même pas eu droit aux mille et une nuits ; alors que le Coquin (88) de service était resté chez lui, la route n'étant pas revêtue. Si les trois Places (88) sont vides, c'est que le Lièvre (83), la Louve (83), la Vache, grosse ou petite (83) ont été effrayés par l'hélicoptère me survolant. Quant à l'Ours (11), aux Harengs, même marinés (88), ils sont en voie de disparition tant on en voit peu. Voie qu'a suivi le Cheval Mort (66), enterré sans fanfare malgré le col des Basses (66). Paix à lui.
Et si je n'ai pas vu le Page (88), j'y ai vu du papier toilette dans les sous-bois avoisinant, comme j'ai vu des sacs poubelles aux Sacs (83) et des journaux froissés aux Journaux (88). Journaux qui ne parlaient pas de paix (ce col existe-t-il ?), même si je l'ai rencontrée aux cols de la Bataille (26) ou de Guerre (83).

Si je n'ai pas vu de Huttes (88), ou de Banquettes (06) à ces cols, je cherche toujours un lit ou un sofa à défaut d'un fauteuil dans lequel tous les passer; pour y déguster les Olives (06) trouvées près de l'Olivier (83), si proche des figues qu'on ne trouve pas au Figuier (66) ; pour déguster le raisin qu'on trouve aux Vignes (09) ou les poires qu'on trouve au Poirier (88), dominant d'ailleurs les primevères et leurs Clochettes (88). Et si le Plafond (88) était bien bas, si les Cascades (83) étaient à sec, les Trois Fontaines (54) furent bien difficiles à trouver dans les parages du col pour faire pousser mes Violettes (83) bien à l'abri du Mistral (83).

Et si j'ai eu la Main Noire (88) de guidoline par la transpiration en montant le Linge (88), ce ne fut pas par un temps de Sibérie (69). Et si j'ai vécu le calvaire en arrivant au calvaire du Calvaire (66), je n'ai rien eu de tout cela en arrivant au Calvaire (68), même par le versant est. Et si on peut boire un ballon d'Alsace (88), il est dur de trouver une photo du Vieux Port au sommet du col de Port (09), tout comme la Croisette (09) est si loin de Cannes qu'on se croirait en pleine Brousse (66).

Et si je n'ai pas trouvé de dent à la Dent (11) ni de couteau au Pradel (09) pour l'affûter sur la Grosse Pierre (88), celle-ci restera telle que, puisque la Sablière (54) n'est pas encore exploitable.

Je n'ai pas vu la Borne (54) ni le Fromage (54), alors qu'au camp des Fourches (04), j'ai vu le camp en ruines et les fourches à foin, mais sans aucune relation de cause à effet. Mais à celui des Fourches (70), celles ci sont dans la grange. Il n'y avait pas non plus de belle Barbe (83) puisque la mienne n'avait que deux jours.

Et si je n'ai pas vu le Gibet (07) ni le manche des Faux (09), pas vu de Croix (09) ni de morts à la Croix des Morts (09), j'espère bien vivre assez longtemps pour me permettre une dernière 'égoïsterie' : avant de passer l'Arme (06) à gauche (merci à P. ANDRE* pour l'idée) : passer ma baisse personnelle.

*voir dictionnaire de P. ANDRE dans revue n° 13 des 100 cols.

Pierre CHATEL (06 - 377)


Page 33 Sommaire de la revue N° 17 Page 35