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Mon 3000 d'anthologie

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Personne, parmi les cyclomontagnards que nous sommes, ne conteste l'utilité de notre guide à tous, à savoir le guide Chauvot. Que d'heures passées à rechercher, répertorier, cocher ces cols avant de les concrétiser sur la carte Michelin pour que le rêve soit plus complet ! Oui, notre bible à tous nous fait rêver, et c'est bien en cela qu'elle est indispensable.

Elle nous permet aussi de dénicher des cols inconnus, situés dans des ascensions célèbres, comme par exemple le Collet de Plan Nicolas pour le Galibier versant nord, ou le col des Tempêtes pour le Ventoux versant sud. Quelle joie pour un "cent coliste" que de découvrir un nouveau col (escaladé par mégarde) et non comptabilisé dans le bilan de fin d'année !

Elle peut cependant être source de désillusion (rarement) si on ne prend pas le temps de la lire attentivement. Au mois d'août 1988, je suis en vacances à Briançon, haut lieu cyclo par excellence. Nous décidons, mon frère Alain et moi-même, de faire l'ascension du col du Sommeiller, culminant, sur la foi de renseignements cyclos dignes de confiance, à une altitude de 3009 m. Le premier plus de 3000 ! Le rêve ! L'extase ! A nous les hautes cimes alpines ! Nous ferons par la même occasion notre premier essai de V.T. T. Ce fut fabuleux, tout y était : le paysage presque andin, les névés absorbant la piste et les quelques motards englués à pousser leurs bécanes dans la neige, les cascades, la flore, le soleil, même la portion de goudron perdue au milieu des cailloux, et surtout la pancarte sommitale, objet de tous nos désirs, avoués ou non, plantée là dans la neige : Col Sommeiller - 3009 m. Photo souvenir pour immortaliser cet instant inoubliable, sur fond d'aiguilles déchiquetées et de lacs glaciaires. Le rêve est réalisé. Après le col d'Allos, premier plus de 2000, voici le premier 3000 ! Le retour fut un vrai plaisir. La rigidité et la souplesse du V. T. T. furent très appréciées, malgré quelques "avatars" dus au mauvais entretien de ces vélos de location.
Décembre 1988 : L'instant rituel de l'édification des listes est arrivé ; celui où le bilan de l'année est transcris noir sur blanc, celui où chaque col est consciencieusement coché sur le guide Chauvot. La routine quoi ! Que vois-je ? O sacrilège ! O rage ! O désespoir ! Une erreur de frappe, une coquille serait-elle possible ? Mais non, je dois me rendre à l'évidence, le col du Sommeiller ne culmine qu'à 2993 m ! Vivement que le niveau de la mer baisse de quelques mètres (à moins qu'un nouvel additif libérateur ne vienne modifier cette maudite altitude, et me rendre ainsi ma joie de vivre !)

Dernière minute : On signale de source sûre (encore une !) qu'un certain Robert Chauvot, armé d'un double décamètre, d'un passe-montagne, et chevauchant un 650, entame une expédition du côté de Bardonnecchia pour lever le doute sur une hypothétique erreur ! Dans la négative, peut-être acceptera-t-il un pot de vin (blanc ou rouge ?) afin que je retrouve ma tranquillité et des nuits enfin paisibles.

Robert LESPINASSE

71 CYCLO-TOURNUS


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