Page 23 Sommaire de la revue N° 17 Page 25a

Gare aux chiens méchants !!!

Revue N° 17 Page 24

Je ne vous ai pas raconté l'épisode du chien féroce... Le gros chien, le chien méchant, le chien qui aboie en essayant d'attraper votre fesse s'il est grand, ou votre mollet s'il est plus petit, même quelquefois la chaussure... le chien errant, le chien de ferme, le chien enragé, le chien de sa chienne... le chien inconnu, pour tout dire, c'est la terreur du cyclo, car haut perché sur sa selle, les jambes nues, les jambes nues et blanches qui remuent, brillent au soleil et les excitent, on est peu de chose, nous autres pédaleurs, en équilibre précaire, oui, on est peu de chose...

La côte est rude, il fait très chaud ; parti dès potron-minet de Vollore-Montagne, je tire une langue comme ça... Mon bidon est vide depuis une belle lurette.;. Vite une ferme, à défaut de fontaine, pour y mendier un peu de divin breuvage, l'eau fraîche et pure des monts d'Auvergne, car je bois beaucoup pour éviter les crampes.
Veine ! En haut de la pente, justement, un bâtiment. Je me hisse peu à peu vers lui, j'y arrive, je pénètre sur le chemin qui y mène... quand un grognement brutal et des aboiements féroces me font sursauter... Un énorme chien noir fonce vers moi, la menace et la bave aux lèvres... Sans hésiter, je fais la seule chose possible en ces cas là... Descendre de vélo pour m'en servir comme bouclier !... Et patatras, je me retrouve par terre, allongé de tout mon long, le pied malencontreusement coincé dans une pédale trop serrée... le chien se rapproche à toute allure, il grossit à vue d'œil... il devient colossal... je protège mon visage du coude, le chien bondit... au-dessus de moi et continue à courir en gueulant toujours aussi fort derrière un chat ou un poulet, que sais-je ? Sans plus faire attention à moi que si je n'existais pas... Le mépris le plus total... J'en suis ulcéré !

Les paysans me relèvent, en me disant: Il n'est pas méchant !!! J'ai vu, merci... Je lave mes genoux et mes coudes écorchés, je bois abondamment pour apaiser une soif décuplée par l'émotion... je remplis mon bidon... et je quitte la ferme...

"Vexé comme un renard qu'une poule aurait pris."

Jacques BENSARD

GRENOBLE


Page 23 Sommaire de la revue N° 17 Page 25a