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Un de perdu

Revue N° 13 Page 32

Dans un chemin montant, sablonneux malaisé
et de tous les côtés au soleil expose,
Un pauvre cyclo rendait l'âme.
Maudissant Michelin, I. G. N. et consorts
Sans plus d'énergie ni ressort,
C'était pitié que de son sort!
Il avait jeté feux et flammes Le tout sans compte et sans mesure
Dans l'aventure...

Heureux qui comme uniste était parti fringant,
Et avait emprunté les sentiers de la gloire.
Méprisant les cols dérisoires,
Les ceuss des pelotons, goudronnés et brillants...
Les muletiers, s'était-il dit,
Voilà qui sent bon la nature,
La liberté, le paradis,
Hors des routes du tout-venant et des voitures,
Préfèrant sans plus palabrer,
Loin du monde et du bruit, goûter l'ombre et le frais...

Grand courage et petit braquet
Et l'altimètre en bandoulière,
Derechef, il va s'embarquer,
Comme on s'embarque pour Cythère,
dans les fourrées, les fondrières,
En profitant des raccourcis,
Aussi. Mais sur le terrain, point d Ariane,
Point de Petit Poucet Finaud,
Aux pattes d'oie, point de panneaux !
Voilà notre héros en panne !
Dois-je prendre à droite ou à gauche ?
Dois-je remonter ce torrent.
Le descendre sans anicroche,
Ou bien sauter de roche en roche,
Clopin-clopant ?

Alors, serrant la queue et portant bas l'oreille,
Trainant l'aile et tirant le pied.
Mal à l'aise dans ses souliers,
Jurant mais un peu tard qu'on ne l'y prendrait plus,
Il dit : C'est pas demain la veille
Que je repartirai tout seul... C'est bien exclus !
Où la guêpe a passé, le moucheron demeure,
N'est pas De Brébissons qui veut,
Aussi vous ferai-je un aveu:
A l'avenir, je reste au chaud dans ma demeure...

J. BENSARD

Grenoble (38)


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