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LES ERREURS ALIMENTAIRES DES CYCLISTES

Revue N° 10 Page 15

Ce qu’il ne faut pas faire

Quel est le sportif de compétition ou non, qui n'a pas souffert un jour ou l'autre, de crampes, fringales ou «coups de pompe», troubles digestifs, points de côté, diminution brusque du tonus musculaire, soif impérieuse ?

Tous ces troubles peuvent être prévenus par une alimentation équilibrée et adaptée, que ce soit avant, pendant et après la compétition.

En effet, c'est longtemps à l'avance qu'il faut adopter de bonnes habitudes alimentaires. Elles contribuent pour une large part à mener progressivement un athlète au mieux de sa forme.

A l'inverse, une alimentation fantaisiste en période de compétition ou de pré compétition, est très souvent source de mauvais rendement à l'effort.

Deux tendances sont rencontrées parmi les sportifs ceux qui sacrifient trop les lois de la diététique à la gastronomie et ceux, au contraire, qui font de la diététique un «moyen » infaillible et miraculeux pour les aider à remporter la victoire.

D'un aliment, ou même d'un nutriment prétendu «prodige», ils font dépendre la possibilité de leurs succès et de leur réussite : qu'il s'agisse de viande crue, de vitamines, de potassium, de sucre ou glucose, etc...

Dans les deux cas, les erreurs ou croyances nutritionnelles sont nombreuses.

Aussi, nous proposons nous de passer en revue les différentes erreurs ou croyances diététiques les plus fréquemment rencontrées dans le domaine sportif.

1/ Prendre des forces au repas précédent l'effort.

En raison de la lenteur relative de la digestion, le dernier repas ne jouera aucun rôle en tant qu'apport d'éléments énergétiques indispensables pour la poursuite de l'effort lors d'une compétition. Tous les spécialistes sont unanimes pour recommander un repas aussi léger que possible.

2/ Manger juste avant l'effort.

Le dernier repas précédant la compétition doit être pris au moins trois heures, et même quatre heures pour certains sujets, avant l'effort.

Pourquoi ce long intervalle entre le dernier repas et le début de la compétition ?

Lorsque l'effort a lieu en pleine digestion, celle ci est fortement perturbée et des crampes d'estomac, voire des vomissements, de la tachycardie (augmentation du nombre des battements du coeur par minute), de l'essoufflement, peuvent survenir.

La masse sanguine, au moment de la digestion, est appelée au niveau de l'appareil digestif et ce au détriment du muscle et du cerveau.

Si, à ce moment là, le sportif effectue un effort, les muscles se trouvent défavorisés alors qu'ils réclament un afflux sanguin pour accomplir leur travail (d'où manque de tonus, mise en train lente et pénible, rendement diminué, somnolence).

Ainsi, il est facile de comprendre que digestion et effort musculaire ne peuvent s'associer sans risque de désagrément.

3/ Eviter certains aliments avant l'effort.

La composition du repas précédent la compétition ne doit pas être rigide. Certains peuvent impunément manger pratiquement n'importe quoi et réaliser leur meilleure performance alors que d'autres, au contraire, doivent s'astreindre à un repas précompétitif style sportif (jambon + tartine de confiture) sous peine d'avoir des difficultés digestives au moment de l'effort.

Je connais un champion de judo qui, durant toute la journée d'un championnat (Tournoi de Paris, Jeux Olympiques) ne pouvait absorber qu'une alimentation liquide.

Ainsi, sans verser dans la démesure, le sportif peut manger de façon raisonnable tout ce qui lui plaît, même si ce sont des aliments ayant une mauvaise réputation en diététique sportive.

Toutefois, si l'on veut mettre toutes les chances de son côté, il est préférable de prendre le repas précompétitif préconisé par les Scandinaves. «Ce repas sera composé principalement de pain, de marmelade (confiture), d'une tranche de jambon et d'une boisson faiblement sucrée (moins de 20 g par litre). En tout état de cause, ce repas devra être léger et il est indispensable de recommander aux athlètes de ne pas absorber des rations importantes de poulet, viande, etc... à ce moment là».

4/ Prendre des comprimés de sel pour éviter crampe et fatigue.

Lors d'efforts intenses et répétés sous forte chaleur, la sécrétion sudorale augmente surtout au niveau de l'eau, alors que la concentration en sel de la sueur diminue. Le rein s'adapte en diminuant l'excrétion urinaire du sodium et les glandes salivaires sécrètent un liquide contenant moins de sel. A ce degré d'adaptation, le sportif entraîné est capable de maintenir son équilibre hydrominéral (eau + sels) et de conserver sa condition physique avec seulement 5 g de sel par jour, tout en fournissant un travail intense en atmosphère chaude et humide et en excrétant 4 à 9 litres de sueur par jour.

Ainsi, l'adjonction d'un peu de sel aux aliments suffit à réparer des pertes excessives.

5/ Prendre du potassium lorsqu'il fait chaud.

Dans les conditions habituelles de l'effort, il n'est pas utile d'apporter un supplément potassique au sportif, vu la très faible perte de potassium par la sueur. De nombreux auteurs en ont apporté la preuve. Une nourriture normale en assure une fourniture suffisante. Au cas où l'on craindrait une perte de potassium, 1/4 de litre de jus d'orange naturel apporte l'équivalent de la perte potassique correspondant à 2 à 3 litres de sueur.

6/ Eviter de boire à l'effort sous prétexte que cela «coupe les jambes».

En sport, deux légendes particulièrement rebelles continent d'être prônées en 1980 :

« Le coureur qui marche le mieux par temps chaud est celui qui boit le moins».

« Ne bois pas à l'effort, cela coupe les jambes».

A notre avis, c'est surtout la tête de ces légendes qu'il serait bon de couper. En effet, les travaux des savants scandinaves ont mis en évidence le rôle essentiel de la boisson dans la réalisation d'une performance.

Lorsque le sportif transpire, les liquides dans lesquels baignent les cellules musculaires diminuent. Ces cellules ne peuvent fonctionner convenablement tant que la quantité de liquide n'est pas rétablie. Pour limiter la baisse du rendement à l'effort dû à la transpiration, il faut apporter de l'eau associée à du glucose. La concentration du glucose dans la boisson varie en fonction de la température de l'air (été ou hiver).
Par exemple :
- au dessous de 10°C => 120 g/I
- aux environs de 20°C => 60 g/I
- au dessus de 25°C => 40 g/I
7/ Augmenter la ration de viande pour accroître la force musculaire.

La plupart des sportifs en sont persuadés et fondent leur consommation excessive de viande sur le fait que les protéines participent à la formation du muscle.

L'adage bien connu «c'est avec du muscle de boeuf que l'on fait du muscle d'homme» est bien incrusté dans l'esprit des sportifs.

Plusieurs travaux ont mis en évidence que la participation énergétique des protides lors d'un effort physique intense n'est pas supérieure à celle de repos. Ce qui veut dire que lorsque la ration est trop importante, au delà de 20 % de l'apport calorique, l'excès est détruit.

8/ Penser que, pour maigrir, il faut transpirer abondamment à l'effort.

Il n'est pas rare de voir des sportifs à l'entraînement se couvrir abondamment et même porter une sudisette dans l'espoir de perdre plus rapidement les kilos accumulés pendant les fêtes ou l'intersaison. Les kilomètres sont même effectués à vive allure, car ces mêmes sportifs ont constaté que la transpiration était plus abondante lorsque l'effort était intense.

Il est certain que la pesée effectuée immédiatement après l'effort indique une perte de poids de un à trois kilos suivant l'intensité et la durée de l'effort. Cela est normal.

Par contre, si le contrôle du poids est effectué après le repas qui suit l'entraînement, le sportif aura la désagréable surprise de constater que la perte de poids est nulle.

En effet, lors de l'effort intense, la perte de poids est due à la déshydratation, autrement dit à la perte d'eau par la transpiration. Lors de la prise alimentaire qui suit l'effort, l'organisme met en jeu toutes ses possibilités pour que l'équilibre des liquides qui baignent les cellules soit maintenu.

Ainsi, lors du repas suivant l'effort, l'eau des aliments ne sera pas éliminée par l'urine mais conservée pour compenser la perte due à l'effort. Par conséquent, le poids mesuré avant l'entraînement n'aura pratiquement pas changé.

Par contre, pour perdre du poids, il faut faire un effort se situant entre 30 et 50 % de sa capacité maximum car, à ce moment là, ce sont les graisses qui seront consommées par l'organisme.

9/ Boire une boisson sucrée plus de 30 minutes avant l'effort en pensant élever le niveau d'énergie.

Il est admis par tous que le dernier repas normal doit être pris au moins trois heures avant la compétition. Par contre, il est inutile de prendre une boisson glucosée entre la fin du repas et 30 minutes avant la compétition. En effet, cette boisson «sucrée» consommée durant cette période entraîne par réaction une sécrétion d'insuline, hormone qui fait baisser le taux de glucose sanguin et ainsi diminue les possibilités physiques au début de l'effort. En d'autres termes, l'excès de sucre au repos sous forme de boisson risque de provoquer des effets inverses aux effets recherchés.

Par contre, une boisson glucosée consommée dans les 30 minutes précédant l'effort, en raison du temps nécessaire pour être absorbée et donc utilisable par l'organisme, sera efficace 20 à 30 minutes après l'avoir bu, c'est à dire au départ de l'effort.

10/ Croire que l'abus de vitamines augmente les performances.

Les vitamines sont des substances sans valeur énergétique propre, nécessaires à l'organisme et à sa croissance, agissant à faibles doses et qui ne peuvent être, en général, fabriquées par l'organisme. Ce qui implique de les lui fournir dans la ration alimentaire. La présence en quantité suffisante de vitamines dans l'alimentation est indispensable pour obtenir de bons résultats sportifs.

Des expériences effectuées sur de jeunes sujets, montrent que l'enrichissement en vitamines de régimes déjà équilibrés n'améliore en rien l'aptitude au travail et à l'effort.

Plusieurs règles importantes sont à respecter lors de l'utilisation de vitamines par le sportif :

Ne jamais donner une vitamine seule mais une préparation polyvitaminée : une seule vitamine absorbée en trop grande quantité entraîne un déséquilibre préjudiciable au rendement musculaire.

- Il n'est pas nécessaire, vitaminiquement parlant, de «doper» le sportif au moment de l'épreuve par une surcharge importante en vitamines. On devra veiller à ce que l'alimentation apporte tous les jours, pendant l'entraînement, une quantité suffisante de vitamines, mais non excessive. Une alimentation abondamment variée (légumes frais, produits laitiers et céréales) permettra, non seulement de couvrir les besoins quotidiens, mais encore d'assurer les doses optimales quotidiennes qui seront légèrement supérieures au minimum quotidien.

Comme le soulignent avec humour les scandinaves :
«L'absorption en quantité importante de vitamines sous forme de pilules est une méthode plutôt coûteuse pour accroître la teneur en vitamines des urines».

11/ Penser que l'alcool est un aliment favorisant la force musculaire.

Les travaux des physiologistes apportent une réponse claire et nette : non. Les calories fournies par l'alcool ne sont pas utilisables pour le travail musculaire. L'élimination de l'alcool par l'organisme n'est pas plus accélérée chez un travailleur de force ou un sportif que chez un sédentaire.

L'alcool peut intervenir, en partie, sur le plan énergétique dans la dépense de base de l'organisme, dite dépense de repos.

Par contre, si cet organisme a une activité normale (marche) ou intense (déménageur, bûcheron, sportif), la dépense calorique va augmenter en fonction de l'intensité de l'effort et pourra atteindre pour le bûcheron ou le sportif une valeur 10 fois supérieure à celle de repos.

La contribution de l'alcool à ces dépenses progressivement croissantes ne varie pas. Ainsi, le travailleur de force «utilise» sur le plan énergétique la même quantité d'alcool que le sujet sirotant un whisky dans son hamac. Tout cela démontre que le travailleur de force n'a pas besoin de plusieurs litres de vin par jour pour accomplir son travail sous prétexte qu'il «consomme» beaucoup d'énergie.

12/ Oublier de s'alimenter durant l'effort = le coup de pompe.

Les sportifs qui «oublient» de s'alimenter régulièrement tout au long de l'effort de type prolongé (ski de fond, marathon, course cycliste, etc ...) peuvent subir des défaillances subites qui leur enlèvent toute force pour continuer à skier, courir ou pédaler.

Cet état de faiblesse, qui porte dans le jargon sportif les noms de fringale, coup de pompe, passage à vide, est facile à stopper par l'absorption immédiate d'hydrates de carbone sous forme liquide ou solide.

Le repas précédant l'effort n'évite en rien l'apparition de la fringale, par contre la prévention passe inévitablement par une alimentation pendant l'effort dès que la durée de celui ci est supérieure à 45 minutes (boissons glucosées : XLI, MILUPA, etc... ; tablettes de dextrose : dextrosanté, dextrodose, etc...).

Docteur J.P. de MONDENARD


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