Le Stelvio réservé aux cyclos

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Inscrits au Club depuis août 99, nous ne totalisions début juin que 11 cols de plus de 2000 mètres ; afin d'étoffer ce palmarès il fut décidé de passer trois semaines dans les Alpes : direction la Suisse.

La première semaine se passe idéalement sous le soleil et les cols s'enchaînent aisément : Sustenen le premier jour au milieu de motards déchaînes, Simplon très fréquenté, Saint-Gothard et son étonnante section pavée. Nous escaladons ensuite la Furka, puis l'Oberalp très facile, le Nufenen coriace ; Grimsel, Splugen, San Bernardino sont négociés sans problème. Tout va bien, trop bien peut-être.

Le jour suivant Julierpass et Albulapass sont au menu : helas il pleut à torrents, il vente et un épais brouillard couvre les sommets. Il est décidé de s'accorder une journée de repos et de se diriger vers le Stelvio en espérant une amélioration climatique. Le voyage est pénible en raison de la pluie, de la brume et de nombreux travaux : notre camping-car n'est pas très a l'aise sur ces routes étroites(le chauffeur non plus).

Nous arrivons enfin à Prato allo Stelvio fatigués mais plein d'espoir car le soleil est de retour ; notre optimisme sera de courte durée car à l'entrée du village un panneau rouge nous informe que le col est fermé (geschlossen). Nous nous installons néanmoins au camping et là, divine surprise, notre hôtesse nous apprend que si le col est fermé aux voitures, les vélos peuvent passer. La fermeture n'est pas due à un enneigement tardif mais à un effondrement de la chaussée : les photos affichées au Syndicat d'initiative sont assez impressionnantes mais l'on devine une étroite langue de route qui devrait permettre le passage de nos montures.

C'est donc gonflés à bloc que nous démarrons à 07 heures sous le soleil. L'ascension débute tranquillement dans la fraîcheur sur une route très calme jusqu'au village de Trafoi ; un panneau nous rappelle que la route est fermée en amont mais forts de nos renseignements nous l'ignorons superbement. Puis nous franchissons la zone où a eu lieu l'affaissement de terrain : rien de bien terrible à vrai dire, çà passe facile, trop facile peut être. Cent mètres plus loin un engin de chantier genre foreuse obstrue totalement la route : impossible de continuer. Plusieurs cyclos italiens arrivent peu après nous : expectative, conciliabule. Il est décidé d'escalader le talus et de contourner l'obstacle en passant dans un bois de mélèzes qui surplombe la route ; plus facile à dire qu'à faire avec les vélos sur un sol humide et en dévers. Nous sommes encouragés dans notre entreprise par des traces de pas qui ébauchent une sente ; d'autres cyclos nous ont précédés. L'obstacle contourné, il faut redescendre sur la route et là ca coince car nous sommes environ trois mètres au-dessus du goudron : pas question de sauter ou de balancer les vélos : nous aidons un cyclo italien à descendre puis il récupère nos engins. Tout le monde est indemne hormis mon cuissard qui gardera une cicatrice postérieure indélébile de l'expédition.

Nos efforts seront récompensés car commence alors une ascension de 10 km sans voiture, sans moto, en silence ; nous grimpons de front avec deux collègues italiens : la route est à nous, la montagne est à nous. C'est le pied ! Le Stelvio rien que pour nous. La barrière de la langue et la pente nous empêchent de parler mis dans ces moments pas besoin de mots pour communier dans l'effort. Au sommet retour brutal à la réalité : flot de voitures et de motos venant de Bormio, odeur de saucisses, marchands de souvenirs etc... Nous échangeons quelques mots avec des cyclos qui font Thonon Trieste et descente glaciale sur l'Umbrail (il a neigé durant la nuit). Une autre surprise nous attend dans la descente entre l'Umbrail et le village de Santa-Maria : environ 4km de route non goudronnée. Nous ne sentons plus nos mains à force de freiner. Néanmoins cette route est magnifique, serpentant dans des bois de mélèzes. Nous regagnons Prato le cœur plein de joie après une journée inoubliable. Ah, si tous les cols pouvaient être fermés !

Chantal (n°4922) et François Péroz (n°4911)