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Chasse aux cols oubliés... point de vue en guise de réponse.

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L'article écrit par Philippe et Paul Gilson concernant les cols oubliés qu'il conviendrait de réhabiliter m'a semblé très intéressant et il mérite, je pense, qu'on s'y arrête un moment.

Je suis sensible à l'argument selon lequel le club des Cent Cols : "pourrait participer à l'action de sauvetage de la mémoire du passé". Il est parfaitement exact que : "des lieux-dits... s'évanouissent... parce que les "anciens" qui en avaient reçu l'héritage oral de leurs pères disparaissent et emportent avec eux leurs noms".

Nous pouvons en dire autant des langues régionales, des coutumes, du folklore, de certains métiers, voire d'un certain savoir, bref, d'une culture locale exceptionnellement riche dont nous ne contemplons aujourd'hui que les vestiges. Les années 70 et 80 ont été marquées par la volonté de réhabiliter, de sauver de l'oubli tout ce patrimoine. Les langues régionales s'enseignent à nouveau, quant aux traditions elles assurent le succès des écomusées qui fleurissent un peu partout. Dans un monde en perpétuelle mutation nous avons furieusement besoin de racines.

Personnellement, j'ai toujours pensé que le club des Cent Cols n'était pas seulement une association de joyeux escaladeurs de cols (ce qui est fort respectable !) mais aussi le conservateur d'un patrimoine à composantes historiques, géographiques, culturelles. Après tout, qui d'autres que nous, recherchent, répertorient, classent des lieux-dits aux noms magiques de cols ? Des noms souvent chargés d'histoire comme ces cols cévenols évoquant la guerre des "Camisards": col de Pendedis ou col de Clerguemort. Si, un jour, certains de ces cols disparaissaient de la mémoire des Anciens, si les cartes n'en portaient plus mention, alors nos listes dressées avec passion seraient là pour en témoigner. Oeuvre culturelle ? De bien grands mots, direz-vous, mais pourquoi pas ?
Se plonger dans le passé nécessite méthode et prudence.

Premier écueil à éviter: faire naître un col parce que le lieu s'y prête. Un sympathique col géographique emprunte alors, sans vergogne, le nom du hameau voisin ! Et quand il y a deux hameaux lequel choisit-on ? Ou alors, selon les cas, on forge un nom de toute pièce pour le nouvel élu. Ceci correspond à la confection d'un faux, comme il y a des faux tableaux ou de la fausse monnaie et nous sommes loin de l'idée de patrimoine à réhabiliter qui doit guider notre action. Dans ces cas-là (peu nombreux il est vrai) je proposerais que le col soit appelé fièrement : "Col des Cyclotouristes". Cela me semblerait plus honnête et chacun y trouverait son compte.
Deuxième écueil : la lecture d'un guide récent ou d'un vieux grimoire permet de dénicher la présence d'un col. Le cas est très fréquent. Cependant, il faut savoir que la magie de l'écrit est très trompeuse. De même que ce n'est pas forcément vrai si c'est écrit dans le journal, un col n'existe pas forcément lorsque son nom se niche dans les pages d'un seul et unique document ! Il faut pouvoir recouper plusieurs sources, je dirais même qu'une enquête sur le terrain s'impose. Les habitants du coin connaissent-ils ce col oublié tous ? Lui donnent-ils le même nom ? Prenons un exemple simple dont l'argument m'est fourni par une lettre d'un cyclo reçue ce jour: le col d'Issor dans les Pyrénées Atlantiques est connu de beaucoup d'entre nous, or, cette dénomination n'apparaît ni sur une carte, ni sur un panneau (à ma connaissance) et pour compliquer le tout les habitants du coin l'appellent : col de Giroune. Que faire ?

Mais compte tenu de ces remarques, de ces mises en garde, quelle tâche exaltante peut s'offrir à nous ! Et si notre prochaine balade avait comme but d'aller "enquêter" sur le passé d'une région ? D'aller à la rencontre des archives de la Mairie ou des archives beaucoup plus vivantes que sont les "Anciens" du village ? Et si nous réalisions un dossier "bien ficelé" sur un col oublié, dossier que nous pourrions transmettre à l'IGN qui n'attend que notre bonne volonté pour modifier, compléter ses cartes en conséquence ? Et si la DDE devant notre amicale pression acceptait de poser un beau panneau au bord de la route ? Quelle belle occasion d'organiser un rassemblement de cyclos, ce jour-là, pour l'inauguration !

Je rêve ? Peut-être ? Mais n'y a-t-il pas d'autres rêveurs au club des "Cent Cols" ?

A vous de jouer...

René POTY


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